10e anniversaire de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones: 13/09/2017
La Déclaration - introduction
La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones a été adoptée le 13 septembre 2007 par l'Assemblée générale de l'ONU, par 143 voix pour et 4 contre, dont celle du Canada.
Elle est le fruit de plus d'une dizaine d'années de discussions propulsées, en quelque sorte, par une directive de la Déclaration et programme d'action de Vienne (1993) recommandant un élargissement du mandat du groupe de travail sur les populations autochtones. Ce groupe a été chargé d'élaborer la Déclaration dont on célèbre cette année le 10ième anniversaire. Plusieurs Autochtones ont d'ailleurs participé à sa rédaction.
Ce document de 46 articles énonce les droits individuels et collectifs des Autochtones dans le monde sur des enjeux tels que l'identité, l‘auto-détermination, la culture.
L‘effet utile de cette déclaration est de permettre à l'ONU de stimuler et d‘évaluer l'engagement et les actions des États en matière de respect des droits des peuples autochtones, sans pour autant avoir d'effet contraignant au plan juridique. La mise en œuvre incombe donc aux gouvernements et États qui doivent examiner les composantes de la Déclaration sous la loupe de leur propre législation et y intégrer ses principes le cas échéant en modifiant les lois internes qui ne seraient pas conformes.Quelques faits saillants
Dans son préambule, l'ONU énonce que la Déclaration "constitue un idéal à atteindre dans un esprit de partenariat et de respect mutuel". Il s'agit d'un outil universel d'affirmation du droit des peuples autochtones (cliquez sur l'image pour le texte complet):
- La reconnaissance des droits culturels
- Le droit de préserver, contrôler, protéger et développer leur patrimoine culturel, leur
savoir traditionnel et autres
- L'affirmation du droit à l'autodétermination, de
l'administration des affaires intérieures
et locales
- Le droit de maintenir et de renforcer toutes leurs institutions
- Le droit aux
terres, territoires et ressources qu'ils possèdent et occupent
traditionnellement ou qu'ils ont utilisés
ou acquis
- Le droit de définir et d'établir des priorités et des stratégies pour la mise en valeur et
l'utilisation de leurs terres, territoires et autres ressources
- Le droit de jouir du meilleur état possible de santé physique
et mentale
- Les États doivent reconnaissance
et protection juridique des terres, territoires et ressources
- Les États prennent mesures pour
améliorer situation économique et sociale des peuples
autochtones
Le Canada et la Déclaration
Le
Canada a voté contre
l'adoption en 2007, tout comme l'ont fait les États-Unis, l'Australie et la
Nouvelle-Zélande.
Le Canada prétextait notamment que le texte était trop général et vague et qu’on ne pourrait l’intégrer au Droit canadien.
Après avoir énoncé son appui aux principes de la Déclaration en novembre 2010 en prenant grand soin de l’édulcorer en y ajoutant bien des caveats, le Canada a finalement décidé de l'appuyer pleinement et sans réserve, en mai 2016.
Cet appui signifie que le gouvernement canadien doit arrimer ses façons de faire avec la Déclaration.
Le gouvernement Trudeau a posé quelques gestes que l'on peut inscrire dans l'esprit de la mise en œuvre de la Déclaration:
- Le projet de loi pour préserver, protéger et revitaliser les
langues autochtones (annoncé en décembre 2016)
-Un examen des lois et politiques fédérales pour assurer leur
harmonie avec la Déclaration (annoncé en février 2017)
- Un engagement à éradiquer les avis à long terme concernant la piètre qualité de l'eau dans les réserves, d'ici 2020 (annoncé budget mars 2016… objectif mis en doute
par la Fondation Suzuki)
- Le processus de réconciliation promis aux
Premières Nations, Métis et Inuits
Des actions concrètes d'intégration de la Déclaration à la législation canadienne demeurent cependant à être posées.
L'épineuse question du consentement: notre commentaire
Le principal élément de la Déclaration qui a ralenti les ardeurs du Canada est celui du consentement libre, préalable et éclairé. Le gouvernement Harper, à l'époque, affirmait que cette notion équivalait à un veto. Il ne voulait pas accorder un tel droit à un groupe de la population canadienne et craignait aussi les impacts comme ceux pour le développement futur de projets énergétiques et d'exploitation de ressources naturelles.
Pour notre document explicatif (cliquez sur l'image ou ici)Or, l'actuel gouvernement Trudeau a pour sa part affirmé que cette Déclaration ne constituait pas un veto, ce qui soulève plusieurs questions et instaure des incertitudes.
Fait à noter, la Déclaration elle même n‘utilise pas le mot veto. Un veto permettrait à une nation autochtone d’empêcher unilatéralement la réalisation d'un projet qui aurait des impacts sur son territoire ou terres ancestrales.
Un consentement préalable à un projet sur un territoire peut cependant s’apparenter à un droit de veto.
Par exemple, si une entreprise désirant exploiter un gisement d'or sur un territoire n'obtient pas le consentement libre, préalable et éclairé de la communauté qui possède des droits sur le territoire, l'entrepreneur ne pourra faire le moindre trou !
Voici une vidéo produite par l'organisme Asia Indigenous Peoples Pact:
Les entreprises, surtout les grandes multinationales des ressources naturelles, soucieuses de leur image, ont tendance à proclamer leur respect des droits des peuples autochtones et à mettre en valeur leurs actions en matière de responsabilité sociale. Bien que la plupart voudront obtenir le consentement avant de réaliser un projet, elles ne veulent pas nécessairement être dans une position où elles seront obligées de l'obtenir.
Or, il existe encore un fossé à combler entre l'état actuel du droit canadien et les droits prévus par la Déclaration. Le gouvernement aura-t-il la volonté et le courage de le combler?
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